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Elisabeth Gilbert Dragić

Un quatorze février, les fleurs c'est la vie

15 février - 14 mars 2019

vernissage jeudi 14 février

Pétale Une
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Film en 2 parties. Voici la 1ère pétale !
Elisabeth Gilbert Dragic nous parle de son amour pour les fleurs.

Dans cette seconde séquence (pétale deux) de la vidéo réalisée à l'occasion de son exposition dans la galerie B+, Elisabeth Gilbert Dragic lève un peu le voile sur sa manière de peindre, entre affirmation et retenue, entre dits et non dits.

FLEUR DE PEAU

Autant vous avertir. N’espérez pas vous défaire facilement des grandes brassées de fleurs que peint Elisabeth Gilbert Dragic. Elles vous lient de leurs évocations tenaces dans une ronde infernale de mots qui font tourner la tête, d’images douces ou nostalgiques, de morceaux de poèmes et de ritournelles. Elles projettent les lianes oniriques et symboliques d’une langue vivante dont vous n’arriverez pas à vous libérer, même au prix du meilleur effort de raison. Les fleurs sont ainsi.

Colchiques, tubéreuses, mandragores, acanthes, pivoines de Chine. Ou encore cyclamens ou dahlias dentelle : les mots qui nomment les fleurs dans une langue savante ouvrent un monde de pensées inconscientes, de références littéraires, mièvres, obscènes ou encyclopédiques. Du même coup, dans cette profusion des images et des symboles, le langage de la fleur devient suspect comme un excès du signe sur la chose. Comme une fiction qui vous colle aux mots.

Sa place dans l’histoire de la peinture est à la fois omniprésente et tumultueuse. Souffrant de la supériorité des grands thèmes et des genres majeurs au temps des Anciens, elle a partagé, sans disparaître complètement, les souffrances de la figure au temps des Modernes avant de faire retour en fanfare dans les palettes acidulées des contemporains. Fleurs sérigraphiées d’Andy Warhol, fleurs compressées  de Yukio Nagagawa, fleurs liquéfiées de Cy Twombly, fleurs en gros plan de Georgia O’Keeffe, fleurs manga de Murakami …  N’en déplaise à Adolf Loos, l’ornement n’est plus un crime.

L’artiste peint de grandes toiles à l’échelle du corps engagé dans des plis infinis et des corolles fanées. Les fleurs sont des continents séparés par des gouffres, des méplats et des crevasses. Des rides et des lèvres.

La peinture acrylique, toute en caprice  sous les chauds et les froids, crée les  textures, les friselis et les velours que le flou du touché, sous la douceur du geste, met à distance de l’œil comme dans un refus de l’évidence. Les teintes sont celles de l’herbier, de ses vieux roses, de ses jaunes rompus et de ses verts lumineux.

C’est de peau dont il s’agit. Celle qui recouvre tout d’un voile qui dissimule le désordre des corps et défie les temps cruels. La fleur est une résistance dressée devant l’imminence de sa chute. Elle est le bouclier pathétique mais aussi la surface d’inscription fragile des symboles résistants aux sacrilèges. La peau farde ses flétrissures. Elle ne peut pas dissimuler sa familiarité avec la mort. 

Il n’y a rien dans cette présence mobile des masses de couleurs qui viendrait mettre en avant la virtuosité d’un geste. Rien qui viendrait dire la présence autonome et ostensible de la peinture s’imposant de force au motif.  Rien n’est permis au geste du pinceau qui viendrait, par orgueil, rompre l’illusion parfaite de notre immersion dans le cœur de cette matrice rassurante. 

La fleur monde.

                                                                                                                          Christian Sozzi I Galerie B+

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